Les minimalistes et post-minimalistes

Pianiste et docteure en musicologie, Emmanuelle Tat nous présente quelques compositeurs et quelques oeuvres minimalistes et post-minimalistes.

Le minimalisme est un courant apparu aux Etats-Unis dans les années 60 et se caractérise par une technique de composition basée sur la répétition de courts motifs évoluant lentement.

La génération qui suit celle de John Cage, Earle Brown et Morton Feldman va peu à peu s’écarter de leurs conceptions. L’influence des musiques de tradition orale devient déterminante et, d’une certaine manière, provoque un retranchement de ce nouveau courant par rapport à celui fondé sur l’indétermination. Des compositeurs comme Steve Reich ou Philip Glass sont plus proches de la démarche « minimale » de La Monte Young et trouvent chez lui ce qui deviendra particulièrement représentatif de cette tendance de la généralisation du principe de répétition.

La musique répétitive fait apparaître d’une part, la limitation de la sphère sonore à une extrême économie de moyens et d’autre part, la soumission du matériau, presque essentiellement tonal, à des procédés de répétition. Celle-ci fait coexister statisme et dynamisme, de laisser percer, sous un environnement musical apparemment immobile, le principe d’un mouvement perpétuel. (1)

L’école américaine de la première heure

Pour Steve Reich (américain, né en 1936) le principe de répétition est un moyen privilégié de réaliser ce qu’il appelle la « musique comme processus graduel » : « Nous commençons un morceau à l’unisson, sur un certain rythme et nous évoluons l’un après l’autre d’après un schéma pré-existant. Il y a donc une forme. Mais plutôt que forme, on peut l’appeler processus musical. » (2)

Steve Reich va appliquer le principe de phasage/déphasage à la musique instrumentale, notamment dans Piano Phase (1967 : https://www.youtube.com/watch?v=6sU-_Sw1Fwo) pour 2 pianos, la première œuvre uniquement instrumentale de cette période. Une mélodie de 12 notes repose sur seulement 5 hauteurs modales jouées en croches. Le déphasage se produit par accélération très progressive d’un des deux pianistes pendant que l’autre maintient strictement le tempo. Cette évolution vers le domaine instrumental correspond avec la fondation en 1966 de son propre ensemble, Reich and Musicians, avec lequel Steve Reich va jouer sa propre musique. (3)

Bien que Phase Patterns (1970 : https://www.youtube.com/watch?v=MgIGmpwSXCQ) pour 4 claviers, souvent pour orgues électriques, soit une extension du principe compositionnel de Piano Phase par sa richesse des motifs résultants des déphasages auxquels s’ajoutent ici la technique de hoquet et la substitution des silences par des pulsations, l’œuvre innove aussi par une attention nouvelle accordée à la couleur. Celle-ci se manifeste surtout dans la quatrième et dernière partie où l’ensemble des moyens instrumentaux, jusqu’alors répartis par famille, s’unissent.(4) De la même année, l’on pourrait ajouter Four Organs (1970 : https://www.youtube.com/watch?v=w0yTZmMgI5I) pour 4 orgues électriques et maracas où cette pièce témoigne de la volonté de Steve Reich d’explorer la technique de déphasage de façon non unidirectionnelle. Un accord unique de onzième de dominante est répété puis, très graduellement, une puis plusieurs de ses notes sont allongées de telle sorte que la pièce se transforme progressivement en une mélodie donnant l’impression de ralentir de plus en plus malgré le soutien constant d’une pulsation maintenue par des maracas. (5)

Dans Six pianos (1973 : https://www.youtube.com/watch?v=fITdlcNpCQM) pour 6 pianos (ou 3 au minimum), l’idée était de faire une pièce pour tous les pianos d’un magasin de pianos mais trop de pianos auraient été ingérables et d’une sonorité trop « épaisse ». L’utilisation de 6 pianos à queue permet de jouer le genre de musique rapide et rythmiquement complexe que Steve Reich affectionne, avec des pianistes physiquement proches les uns des autres afin de s’entendre clairement. (6)

S’ajoute aux œuvres pour plusieurs pianos Finishing the Hat (2011 : https://www.youtube.com/watch?v=pUIFLPxOH5s) pour 2 pianos, un arrangement par Steve Reich du thème principal homonyme de la comédie musicale Sunday in the Park with George (1984) de Stephen Sondheim.

Chez le compositeur américain Philip Glass (né en 1937), la plupart de ses pièces naissent de l’adjonction de rythmes à la ligne mélodique, qui créent un certain continuum sonore : « Mon souci principal a porté sur les structures répétitives et les processus additifs qui ont pour base un battement régulier de doubles croches. (…) Le matériau mélodique souligne de simples relations de hauteur ».(7) C’est le cas de In Again out Again (1967 : https://www.youtube.com/watch?v=EXaaq-1PSko) pour deux pianos tandis que Philip Glass trouve inadéquat de qualifier ses œuvres de minimalistes à partir des années 1970, notamment celles après Music in Twelve Parts datant de 1971-74.

Four mouvements for Two pianos (2008 : https://www.youtube.com/watch?v=BD7ogEyCv6E) s’appuie sur les possibilités expressives du piano. Le compositeur utilise la répétition en s’orientant vers un développement harmonique, c’est-à-dire qu’il introduit des notes supplémentaires qui apparaissent comme « fausses » mais qui s’intègrent rapidement dans leur contexte. La pièce Two Movements for Four Pianos (2013 : ) pour quatre pianos fait suite à la précédente.

Formé auprès de Morton Feldman et influencé par John Cage, Tom Johnson (né en 1939) est dans un premier temps critique de la revue Village Voice où il fera connaître Philip Glass et Steve Reich en commençant à y parler de minimalisme. Sa technique compositionnelle est de type formaliste et repose sur des procédés logiques. Il évoluera plus tard vers des techniques plus complexes en faisant appel aux mathématiques. Voicings (1984 : https://www.youtube.com/watch?v=Voq9SlRFz7g&ab_channel=JeroenVanVeen-Topic) pour 4 pianos repose sur une seule phrase que les pianistes répètent : la musique est toujours la même mais les distributions des notes changent constamment.

Redécouvert seulement depuis une dizaine d’années, Julius Eastman (1940-1990) est un compositeur, pianiste, chanteur et danseur afro-américain. Il fait partie des premiers musiciens à associer des éléments de musique pop à la musique minimaliste. Reconnu par l’avant-garde new-yorkaise, il a cependant disparu dans l’indifférence et l’oubli général. Parmi ses œuvres (mais la plupart ont été perdues), une pièce pour piano 4 mains Touch Him When de 1970 et une trilogie, dont les titres ont un aspect politiquement provocateur, écrite pour un quatuor de n’importe quel instrument mais souvent interprétée pour 4 pianos : Evil Nigger (1979 : https://www.youtube.com/watch?v=JuU-619H1q8), Gay Guerilla (1980 : https://www.youtube.com/watch?v=BOhynJVU4LM&t=53s) et Crazy Nigger (1980 : https://www.youtube.com/watch?v=4aR0naIp9eM). L’intensité incandescente est forte dans Evil Nigger où les trémolos, les notes répétées et les grandes descentes parsèment la pièce, tandis que Gay Guerilla fait apparaître la couleur sonore des pianos à travers une lente progression de deux notes brèves puis une note longue. La dernière pièce de cette trilogie, Crazy Nigger, est la plus longue et emmène hors du temps sur des ondulations et des vibrations sonores proche de cloches.

Des compositeurs néerlandais

En dehors de l’école américaine, un premier compositeur néerlandais, Simeon Ten Holt (1923-2012) qui, après une influence sérielle, travaillera sur la répétition et la tonalité. Au fil des ans, il crée plusieurs pièces pour piano qu’il appellera des pièces de réflexions de sa propre vie intérieure, par opposition aux œuvres formalistes qu’il écrivait auparavant. C’est le cas de Canto Ostinato (1975-79 : https://www.youtube.com/watch?v=pQakgryixO0) pour claviers, Lemniscaat (1982-83) pour claviers, Horizon (1983-85 : https://www.youtube.com/watch?v=dY3kZTjfx6o&t=156s) pour claviers, Incantatie IV (1987-90) pour claviers et autres instruments, Schaduw noch Prooi (1993-95) pour 2 pianos, Méandres (1997) pour 4 pianos. Sekwensen (1965) pour 1 ou 2 pianos est une pièce faisant partie de sa précédente période.

Canto Ostinato est une de ses œuvres les plus connus où le compositeur propose d’autres combinaisons d’instruments à claviers mais suggère qu’une interprétation pour 4 pianos est souhaitée. Simeon Ten Holt parle de « code génétique » plutôt que de musique minimaliste et qualifie les concerts de « rituels ». Cette pièce, composée de 106 cellules pouvant être répétées selon le choix des interprètes, peut varier d’une durée de 30 minutes jusqu’à une journée entière.

Louis Andriessen (1939-2021) tient une place à part dans la création contemporaine où son parcours, riche et éclectique, dévoile des inspirations et des influences nombreuses. Il est tout d’abord considéré comme l’un des principaux compositeurs sériels néerlandais dans les années 50 et l’on trouve cette esthétique durant cette première période notamment dans sa pièce Séries (1958) pour 2 pianos. Puis il délaisse le sérialisme pour se tourner vers une écriture cagienne avec Ittrospezione I (1961) pour piano à 4 mains, partition graphique. Le compositeur intègre par la suite les techniques des minimalistes à son vocabulaire musical mais en propose un prolongement, à la fois esthétique et politique. Aussi bien influencé par le monde du jazz et du rock que par Igor Stravinsky, Pierre Boulez, Terry Riley ou encore Steve Reich, son instrumentarium se voit diversifié comme le montre Dubbelspoor (1986-94 : https://www.youtube.com/watch?v=lS9VH04wm7I), musique de ballet pour un quatuor de claviers : piano, clavecin, célesta, et glockenspiel. La répétition permet l’apparition de l’imprévisibilité timbrique et mélodique, et où une « mélodie de l’ombre » écrite dans la partition mais non jouée par un instrument en particulier émerge de cette musique. Cet effectif instrumental est assez proche dans Les Cloches de Harlem (2002 : https://www.youtube.com/watch?v=glwUvF2nLEA) pour piano, célesta, synthétiseur, vibraphone et glockenspiel, où l’importance du timbre est mise en exergue comme dans The Garden of Ryoan-gi (1967) pour 3 orgues électroniques, où l’orgue électronique est utilisé comme instrument à part entière plutôt qu’un outil de manipulation électronique.

Citons également The Hague Hacking Scrap de 2003 (https://www.youtube.com/watch?v=AUo9nSNtzJ8) pour 2 pianos, sorte de « danse des doigts » s’inspirant d’une musique house hardcore parfois très rapide et où la technique du hoquet développée par l’ars nova du 14e siècle, cher au compositeur, apparaît dans la deuxième partie de la pièce.

Dans la génération plus récente des compositeurs néerlandais, Douwe Eisenga (né en 1961) propose une grande production de pièces pour plusieurs pianos, notamment avec des versions à la fois pour 2 ou 4 pianos dans City Lines (2006-2007 : https://www.youtube.com/watch?v=30uFc1vXVAw&ab_channel=JeroenvanVeen-Topic), Les Chants Estivaux (2008) et Les Chants d’Automne (2012). Le compositeur dit avoir composé City Lines, une pièce très chantante qui joue sur des chevauchements et des ruptures parfois abruptes, en pensant aux œuvres de Simeon Ten Holt. Les Chants Estivaux offrent une structure immobile-tourbillonnante, enlaçant leur obstacle de boucles toujours plus serrées, qui seront également présentes dans Les Chants d’Automne, averse de notes vives et joyeuses à travers une course parfois ralentie, parfois prise de fougue incandescente.

Plusieurs pièces pour 2 pianos jalonnent également le parcours du compositeur comme Cloud Atlas (2007 : https://www.youtube.com/watch?v=nrN0O5VsNlo&ab_channel=JeroenvanVeen-Topic), inspiré du roman de David Mitchell, où une sourdine dans le médium-grave contraste avec le registre aigu du second piano ; Kick (2015) qui explore des motifs entrelacés typique d’un minimalisme que Douwe Eisenga préfère nommer « maximalisme » puisqu’il tire le maximum d’un matériau limité avec un rythme effréné se rattachant aux musiques foraines (« Kick » signifie « ruade ») ; ou encore une version de son Piano Concerto (2015) pour 2 pianos en trois mouvements alternant vif-lent-vif.

Quelques compositeurs post-minimalistes américains

Revenons à l’école américaine, notamment avec des compositeurs influencés par les minimalistes de la première heure comme John Mac Guire (né en 1942) qui cherche une synthèse entre le minimalisme et le sérialisme avec lequel il s’était familiarisé pendant ses études en Allemagne, en particulier auprès de Stockhausen. Son travail au cours des 25 années suivantes a été entièrement consacré à l’exploration et au développement de divers aspects de cette synthèse, en particulier la fusion des fonctions tonales élémentaires avec les structures temporelles chromatiques.(8) Deux pièces écrites pour pianos : Freize (1969-74) pour 4 pianos et 48 Variations (1976-80 : https://www.youtube.com/watch?v=jQtxXoDJPeY) pour 2 pianos.

Pour Kyle Gann (né en 1955), son travail compositionnel se fonde sur des boucles se répétant, des ostinatos ou des isorythmes de différentes longueurs qui se déphasent les uns des autres. Un autre fil conducteur de son travail est l’influence, à la fois rythmique et mélodique, de la musique amérindienne notamment dans l’utilisation de tempos différents. Tel est le cas dans Long Night (1980-81 : https://www.youtube.com/watch?v=jzq8wYDUm0k&t=123s) pour 3 pianos non-synchronisés où se chevauchent 3 tempos (90, 100 et 110) ou encore dans L’itoi Variations (1985) pour 2 pianos. The Convent at Tepoztlan (1989) pour 2 pianos (ou 1 piano et bande) propose un canon écrit dans le style de Colon Nancarrow à un rapport de tempo 23:24 et à une différence de hauteur d’une tierce mineure entre les deux instruments. Ces derniers commencent ensemble puis se séparent dans le temps et se rejoignent à la fin. Dans Implausible Sketches (2006) pour piano à 4 mains, la pièce se divise en 5 mouvements : « The desert’s Too-Zen Song » se base sur un ostinato de 61 temps, interrompu tous les 103 temps, « Mediating Daydream » se déroule lentement dans un rythme harmonique, « The goodbye fugue » est la seule fugue écrite par le compositeur, « Fridig Azure » est un mouvement lent, monotone et désespéré dans un genre musique d’ambiance, et « Don’t Touch my pint » est une version épurée d’un mnémonique irlandais pour le rythme.

Kyle Gann travaille également sur la musique microtonale en reliant les accords par de minuscules variations dans la conduite des voix comme on peut le voir dans sa Romance Postmodern (2015 : https://www.youtube.com/watch?v=aeSB1GBrKTQ) pour 2 claviers électroniques gérés par ordinateur, sorte d’étude d’accord sur 33 harmoniques de mi bémol.

Julia Wolfe (née en 1958) s’inspire de la musique folk, classique, rock ou jazz, notamment dans My Lips from Speaking (1993 : https://juliawolfemusic.com/music/my-lips-from-speaking/) pour 6 pianos où l’on retrouve le riff d’ouverture joué au piano par Aretha Franklin dans « Think ». La pièce fragmente ce riff, l’étale, le fait tourner dans une sorte de frénésie extatique. La compositrice en fera une version pour piano et bande la même année puis pour 2 pianos en 2011.

Cette pièce pour 6 pianos a été écrite pour un ensemble anglais composé de 6 pianistes, le Piano Circus, qui fera également la création de Face so pale (1992 : https://www.youtube.com/watch?v=FbdD6NOqQf8&ab_channel=PianoCircus-Topic) de David Lang (né en 1957). Cette œuvre reprend la chanson d’amour de Guillaume Dufay Se la face ay pale que le compositeur divise en trois parties originales de la chanson entre les six pianos avec des procédés d’étirement et de traction.

Quelques compositeurs anglais

Graham Fitkon (né en 1963) écrira trois œuvres pour l’ensemble Piano Circus : Loud (1989 : https://www.youtube.com/watch?v=IwMY6bP33x8), Log (1990 : https://www.youtube.com/watch?v=Wl61OYBq5G4) et Line (1991 : https://www.youtube.com/watch?v=28O5oTbL9Bs). S’ajoute à son répertoire pour plusieurs pianos Flak (1989) pour 2 pianos, 4 pianistes, 8 mains, Totti (2004) pour 4 pianos et White (2004) pour 2 ou 4 pianos. Une grande partie de ses œuvres se consacrent au piano, dans une écriture tonale et complexe, où le compositeur reconnaît son influence classique avec des compositeurs comme Igor Stravinsky, Anton Webern ou Pierre Boulez, mais aussi du minimaliste Steve Reich.

Le compositeur John Metcalf, canadien d’origine anglaise, né en 1946, compose également une pièce pour 6 pianos à l’attention du Piano Circus : Never Odd or Even (1995 : https://www.youtube.com/watch?v=xtAHnv_gLp4&ab_channel=JeroenVanVeen). Il s’agit d’un palindrome : les pianos 2 et 5 partagent une séquence d’accords qui contient une série clairement audible de palindromes harmoniques. Les pianos 1 et 4 ont une série de palindromes rythmiques, décoratifs dans le registre supérieur des claviers, fonctionnant comme des canons stricts. Et les pianos 3 et 6 ont chacun une ligne legato en octaves dans le registre grave formant un seul palindrome mélodique et rythmique en canon. Tous ces palindromes sont de longueurs différentes et sont en phase afin que le matériau soit toujours entendu dans de nouvelles relations.(9)

Toujours pour l’ensemble Piano Circus, Which ever way your nose bends (1989 : https://www.youtube.com/watch?v=eGuRhpNGw1k&ab_channel=PianoCircus-Topic) du compositeur et plasticien anglais Simon Rackham (né en 1964). Les notes de la gamme diatonique sont divisées à chacun des 6 pianos et la 7ème note est partagée par tous les claviers. Cette pièce se veut à l’antithèse de la pièce de Steve Reich, Six Pianos. Chez Simon Rackham, le piano est au centre de son travail : d’autres pièces pour 6 pianos comme Experimental Music for Dr Zack (2013) composé de six lignes mélodiques jouées par les six pianos, Man Made Music (2010) où la structure musicale est conceptuellement préconçue, ou encore Still Begining, Never Eding (1995) où les première et troisième parties sont écrites en canon très strict et où le mouvement central lent suggère une sensation d’improvisation élégiaque. Pour 5 pianos, Five Times Five (2017) est une œuvre où les 5 pianos sont enregistrés dans 5 tempi différents et enregistrés avec un travail de stéréo accentué selon les registres tandis que dans The Probability of beauty (2007), dix courts fragments de musique sont joués simultanément au début par les 5 pianos, puis progressent vers un jeu de combinaisons de superpositions avant d’être rejoués tous ensembles vers une fin qui procède à un jeu d’élimination.

Puis ce sont les pièces à 3 pianos avec White Noise (2018) où les instruments jouent sur les notes blanches au-dessus du do moyen créant un son complexe qui se chevauche et s’entrelace et Multicoloured Music (2013) en lien direct avec la peinture du compositeur. Beaucoup d’autres pièces encore pour 2 pianos, 1 piano 4 mains ou pour 3 mains sur 1 piano. L’on peut citer notamment ces œuvres où le mélange de claviers est présent : Sounding Still (2015-16) pour piano et orgue électrique qui utilise le potentiel du maintien du son de l’orgue contre l’inévitable décomposition d’une note jouée sur le piano ou Full Time (2014) pour piano et piano électrique.

Parmi les compositeurs anglais, il s’agit de ne pas oublier de citer Michael Nyman, né en 1944. Ses études sur la musique baroque anglaise marqueront le parcours de celui-ci, ainsi que sa formation de pianiste et de claveciniste. S’il débute sa carrière en tant que critique musical, il commencera à écrire à partir de 1976, date de sa pièce 1-100 pour 4 à 6 pianos (https://www.youtube.com/watch?v=ud3WOkFWsqY) où il s’agit d’une suite descendante d’accords modulant selon le système des tons voisins caractéristique de l’époque baroque, mais où chaque interprète à son rythme. Puis on retrouve le piano dans un arrangement de Water Dances (https://www.youtube.com/watch?v=_7e4AG6RLlA) en 1985 pour 2 pianos, à l’origine pour un ensemble instrumental.

Beaucoup d’autres compositeurs pourraient encore être cités comme le compositeur anglais Gavin Bryars, le compositeur belge d’origine polonaise Piotr Lachert, les compositeurs américains Frederic Rzewski et Nico Muhly, ou encore le japonais Jo Kondo. Les courants minimaliste et post-minimaliste ont attiré bon nombre de compositeurs vers cette esthétique encore d’actualité de nos jours où il semblerait d’ailleurs que la multiplication d’un même instrument, en l’occurrence le piano pour ce qui nous concerne, est un atout au niveau de l’écriture polyphonique. Chaque pièce de chaque compositeur trouve alors ses inspirations particulières, ses propres repères et ses influences les plus diverses et variées.

Emmanuelle Tat

Professeure de piano

emmanuelletat2@free.fr

(1) : Révolutions musicales, Dominique et Jean-Yves BOSSEUR, Minerve, Collection Musique Ouverte, 1993, pp 151-156.

(2) : Reich, Steve, in VH 101, n°4, Musique Contemporaine, Paris, Esselier, 1970-71, p.97.

(3) : Noubel, Max, présentation de l’œuvre sur Brahms-Ircam :

https://brahms.ircam.fr/steve-reich#parcours.

(4) : Idem.

(5) : Idem.

(6) : Reich, Steve, présentation de sa pièce.

(7) : Glass, Phil, in VH 101, n°4, Musique Contemporaine, Paris, Esselier, 1970-71, pp.46-48.

(8) : Gann, Kyle, Minimal Music, Maximal Impact, web magazine de l’American Music Center, 2001.

(9) : Présentation du compositeur.

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